préambule

Je suis une féerie, voyage imaginaire,
Royaume de braveries et d’efforts éphémères.
Conjuguant le talent, la force et la beauté,
Paillettes et allant, sourires et volupté.

 C’est mon avant-courrier, qui prépare ma venue,
M’indiquant où aller, par mon flécheur de rues.
De nuits peu éclairées, venu en maringotes,
J’investis le quartier de toutes mes roulottes.

 Organisant mes jours, en lourde logistique,
Gravitant tout autour, du grand cercle magique.
Mes « tchécos » de la troupe à la vergue, au laçage,
Hissent la toile « Ay Roop », navire d’amarrage.

 Sous l’auguste coupole de mon haut chapiteau,
J’accueille les symboles de l’art et des tréteaux.
A l’abri des regards, derrière ma gardine,
Mes acteurs se préparent à l’ombre et en sourdine.

 Ils ont des noms de piste, saltimbanques, baladins,
Clowns, banquistes, bateleurs, circassiens.
Inusables porteurs, parfois même barristes,
Bien légers voltigeurs, aussi fildeféristes.

 Certains en main à main, couverts de magnésie,
En empilement humain, forment une poésie.
D’autres sur une boule, équilibre précaire,
Tiennent en haleine les foules, venues de la salière.

 Sur câbles funambules, très agiles jongleurs,
Au sol à la bascule, batoude et tapeurs.
Couchés sur la trinka, rares antipodistes,
Sur le rolla-bolla, curieux équilibristes.

 Montés sur des échasses ou un mât de perchistes,
Tout recouverts de stass, souples contorsionnistes.
Monocycles farceurs, ils font l’acrobatie,
Par groupes tous en cœur pour le charivari.

En trapèzes, balançoires, sur le cadre aérien,
Washington ou la barre, gréeurs et icariens.
Ils rêvent en volant, sautent en trampolino,
Voltigent en grand ballant, en leotard, aux anneaux.

 Dans la sciure dresseurs munis de chambrières,
Inflexibles dompteurs, aidés de la barrière.
Du tunnel au sabot, cage de ménagerie,
Requisits et cerceaux, perpignan bien saisi.

 Et l’ankus du cornac, qui invite à s’asseoir,
Sous le soleil en palc, tandis qu’au montoir,
Au panneau, l’écuyer paré pour la parade,
Avec longe et surfaix, lance la cavalcade.

 J’engage la musique, illumine mes feux,
Et c’est l’instant critique, du début de mes jeux.
Comme un bel artifice j’enchaîne les numéros.
Rien ici n’est factice, la performance prévaut.

 Le long de ma banquette, volent des diabolos,
Girent bouquets d’assiettes, tournent « kiwidos ».
Juste devant mes loges, tournoient balles et massues,
Dans le sens des horloges, cascades inattendues.

 Du haut de mes gradins, riant des faire-valoir,
Évitant les gadins, planent légers foulards.
Et valsant les chapeaux, lancés par le galoupe,
Satou pris aux lassos, ondule au hula hoop.

 Puis c’est en souquenilles, en sacs et en blancs cônes,
Qu’arrivent en chenille, mes célèbres icônes.
Et que maître loyal, d’une voix tonitruante,
Chasse pitre jovial, en dehors de la tente.

 Échappant au contrôle du rire et l’engouement,
Fantaisiste et drôle, spectacle bien vivant.
Dans mes pinces bien ancrées, je suis donc seul unique,
À lancer « Envoyez !!  Et bienvenue au cirque ! »

Sufre